Il fut un temps où, quand je demandais à des adultes apprenant le français ce qu’ils faisaient quand le mur de Berlin est tombé, j’eus l’occasion d’entendre d’incroyables histoires.
Tel allemand, qui, expatrié à Paris, découvrit « la chose » en achetant son « Libé » après le petit déjeuner et en tomba presque d’inanition sur un trottoir de la capitale.
Tel autre qui, journaliste à la Deutschlandfunk alors en poste à Berlin, dînait tranquillement dans un Restau du Ku’ damm (un des endroits chics de Berlin Ouest), quand tout à coup il vit passer une « trabi » si ce n’est pimpante du moins klaxonnant à tout rompre sur l’avenue… et qui, toujours lui, reçu 30 secondes plus tard un appel de son rédacteur en chef le priant d’aller illico presto, au pied levé, couvrir l’événement avec son micro de fortune et sa propre émotion à gérer.
Tel autre enfin, jeune musicien à Dresde, qui alors qu’il animait une soirée dansante sur un bateau mouche quelconque sur le cours de l’Elbe, ne put s’empêcher de s’arrêter le souffle coupé, quand le dit bateau passa sous un pont où veillaient, en rang et bien alignés des milliers de VoPo, comprenez des militaires de l’armée est-allemande, armés jusqu’aux dents, les chars à disposition pas loin dans une obscure banlieue, tous prêts à intervenir et casser du « contre-révolutionnaire » au cas ou le parti donnerait son feu vert.
Brrrrrrrrrr.
Bon.
Ça, c’était il y a une dizaine d’années.
Aujourd’hui, la plupart de mes interlocuteurs en français, sont des jeunes de moins de 25 ans, soit qui à l’époque n’étaient pas même nés.
Or d’après un sondage publié récemment outre-Rhin, il semblerait quoi qu’il en soit, que moins d’un allemand sur deux ne sache quand le mur de Berlin a été seulement construit (Réponse : août 61).
Alors, pour une jeune d’aujourd’hui, né et ayant grandi dans une Europe en paix et quasi unifiée, difficile voire impossible de s’imaginer une demi-seconde ce que signifiaient le rideau de fer, la vue seule d’une frontière entre l’Ouest et l’Est, le passage terrorisé de cette dite frontière et… le mur de Berlin.
Pour ceux donc qui aurait oublié, n’aurait jamais su et avant que ne commencent les commémorations de sa chute (le 9 novembre prochain, dépêchez-vous pour les billets d’avion, de train et les réservations d’hôtel…), rappels en quelques images… de ce mur de protection « antifasciste » (comprenez devant empêcher les allemands de l’Est d’aller fricoter avec le système capitaliste dévoyé de l’Ouest, ou dit autrement, de fuir la RDA et vider le pays des travailleurs par excellence… de ses travailleurs).
Le mur, pendant sa construction en 1961.
Le dispositif de la frontière berlinoise (le mur, en somme) : 156,4 kms de frontière bétonnée, 302 tours d’observation, 20 bunkers, 11 504 militaires au service des frontières.
On estime qu’entre 138 et 245 personnes y périrent. Pour pouvoir repérer les éventuels fuyards, une bande de sable fin (en jaune sur le croquis) était tous les jours impeccablement ratissée pour permettre de noter chaque trace de pas…
Côté Est, le mur était blanc (ou neutre) histoire de mieux les percevoir également. Côté Ouest : des graffitis.
Ici, pour parfaire le tout, vous remarquez des fils de métal auxquels sont attachés des bergers allemands, qui furent euthanasiés après la chute du mur. Il existait près de 260 tronçons de tels fils. Cela rappelle autre chose et donne froid dans le dos.
La Postdamerplatz du temps du mur. N’est-ce pas charmant ?
Enfin, avant qu’un post sur le 9 novembre ne suive, petit rappel de l’ambiance pas du tout toujours pacifique dans laquelle s’est déroulée cette « révolution de velour ».
Tout le monde a vu Good By Lénine (Wolfgang Becker, 2003) je pense. Cet extrait se situe au début du film. Quand la Stasi rafle le maximum de manifestants…
http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19467649&cfilm=52715.html